Maître GALLET répond à une auditrice de FRANCE INFO, dans le cadre de ce que l’on appelle communément un “mariage gris“.
La suite par ici…
Jeanne s’est mariée très jeune avec un ressortissant marocain, qu’elle avait rencontré à l’occasion d’un séjour en vacances.
Eperdument amoureuse, Jeanne envisage très vite de se marier avec cette personne, mariage célébré sur le sol marocain.
De retour en France, elle effectue les démarches administratives nécessaires afin de faire venir son mari à son domicile parisien, censé devenir le domicile conjugal.
Mais surprise, dès son arrivée, son mari quitte le domicile et s’installe chez sa famille à l’autre bout de la France.
Se sentant trahie et humiliée, Jeanne se demande comment revenir en arrière en obtenant l’annulation de son mariage.
Maître Matthieu GALLET, Avocat au Barreau de Paris, est avec nous.
Alors première question Maître, Jeanne a-t-elle conclu un mariage blanc?
Pas tout à fait.
Un mariage blanc suppose que les deux époux aient contracté mariage en vue d’atteindre un effet étranger ou secondaire au mariage.
En d’autres termes, il faut qu’il n’y ait aucune intention matrimoniale de la part de deux époux.
Mais lorsqu’un seul époux a volontairement induit en erreur son conjoint dans le seul but d’obtenir un titre de séjour ou d’acquérir la nationalité française, comme c’est le cas en l’espèce, il s’agit d’un mariage dit “gris“.
Et une procédure en annulation est-elle envisageable contre ce type de mariage ?
Oui, tout à fait.
En effet, le mariage repose sur un échange de consentement.
Or, à chaque fois que le mariage avait pour but d’atteindre un effet étranger ou secondaire au mariage, le consentement est considéré comme faisant défaut, et le mariage est déclaré nul faute de véritable intention matrimoniale.
Il s’agit donc en l’espèce d’un vice du consentement ?
Exactement.
Ce vice de consentement peut être considéré soit, comme une erreur sur les qualités de la personne, soit comme une absence de consentement.
– Dans le premier cas, c’est-à-dire dans le cas d’une erreur sur les qualités de la personne, le conjoint a simulé son comportement, ce qui a induit en erreur l’autre conjoint sur les véritables intentions de la personne qu’il a épousé.
Il s’agit alors d’une nullité dite “relative“.
– Dans le second cas, il y a une absence totale de consentement, et pas seulement un vice de celui-ci.
Dans ce cas il s’agit d’une nullité dite “absolue“.
Mais quel est l’intérêt d’engager cette procédure par rapport à une procédure de divorce, qui aurait aussi pu permettre à Jeanne de mettre fin à son mariage ?
Le divorce et l’action en nullité sont deux procédures biens distinctes.
– Avec l’action en divorce, le mariage va être rompu, dissous, mais sans remise en cause de sa validité.
Les effets de cette action ne vaudront ainsi que pour l’avenir.
– Mais avec la procédure en nullité, le mariage est anéanti.
En d’autres termes, c’est comme si le mariage n’avait jamais existé. Comme pour le divorce, cette action aura des conséquences pour l’avenir. Mais elle agira aussi de manière rétroactive, en gommant en quelque sorte tous les effets du passé.
Et quelles en sont les conséquences pour l’époux de mauvaise foi ?
Hé bien Karine, l’annulation du mariage va entraîner plusieurs conséquences pour l’époux qui a trompé son conjoint sur sa véritable intention :
– Tout d’abord, celui-ci ne pourra pas bénéficier des avantages liés au régime matrimonial
– Il pourra également être condamné à verser des dommages et intérêts à son ex conjoint,
-Dans le cas de Jeanne, il perdra la nationalité française, qu’il a acquise grâce au mariage.
– Surtout, il existe depuis la loi du 26 novembre 2003 un délit, prévu par l’article L623-1 du CESEDA(Code d’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), qui puni le fait de contracter mariage à la seule fin d’obtenir ou de faire obtenir la nationalité française d’une peine d’emprisonnement de 5 ans et de 15 000 Euros d’amende.