L’état s’est engagé à mettre en place un « service public des pensions alimentaires » à compter du mois de juin 2020, dans le cadre de la loi 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la Justice, publiée le 24 mars 2019.
Les C.A.F seront compétentes pour les révisions de pensions alimentaires et pourront délivrer un titre exécutoire selon la loi précitée.
Il s’agit d’un mécanisme expérimental d’une durée de trois ans dans une liste de département fixée par décret, destiné à faciliter les demandes de révisions de pensions alimentaires formulées par les parents isolés ou en difficulté, lesquels doivent jusqu’à présent saisir le Juge aux Familiales près le Tribunal de Grande Instance du ressort de la résidence principale de leur enfant.
Un progrès ?
La Gouvernement assure que le traitement des demandes de révisions sera plus rapide que celui actuel (De trois mois à un an environ selon l’engorgement des Tribunaux).
Mais également plus facile car les demandeurs n’auront plus à accomplir de nombreuses démarches administratives, afin d’obtenir une révision de la pension, la C.A.F. devant compétente pour délivrer des titres exécutoires (valeur de Jugement exécutable).
Les demandes de modifications pourraient, selon le texte, être fondées sur “l’évolution des ressources des parents” ou « des modalités de l’exercice du droit de visite ».
Il convient d’être en l’état réservé sur l’opportunité de cette réforme.
En effet, les professionnels de la Justice, Juges et avocats, autrement dit ceux qui connaissent le sujet, sont confrontés aux parents tous les jours, à la complexité des enjeux familiaux sont en frileux sur l’intérêt de ces nouvelles mesures pour les raisons suivantes :
- L’accès au Juge aux Affaires familiales dans le cadre d’une demande de révision de pension alimentaire n’implique pas l’intervention d’un Avocat obligatoire, la saisine du Juge peut se faire par le biais d’un simple formulaire adressé au Juge, lequel convoque ensuite les parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
- Si les délais de traitement de ces demandes peut paraître trop long, il serait probablement plus judicieux d’augmenter le nombre de Juge et le budget accordé à la Justice, lequel est un des plus faible de l’Union Européenne proportionnellement au P.I.B de notre état et sa démographie.
- Enfin, avons-nous vraiment envie de vivre et dépendre d’algorithme déshumanisés dans le traitement de nos différends ?
Un coup d’arrêt à cette réforme a été donné par le Conseil Constitutionnel, lequel dans sa décision n°2019-778 du 21 mars 2019, la plus longue jamais rendue par cette institution créée en 1958, a jugé non conforme l’article 7 de cette loi prévoyant la révision des pensions alimentaires par la C.A.F.
Cette nouvelle procédure de révision n’aura donc pas lieu en l’état.
Les sages ont gravement rappelé : “Le législateur a autorisé une personne privée en charge d’un service public à modifier des décisions judiciaires sans assortir ce pouvoir de garanties suffisantes au regard des exigences d’impartialité découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789“.
Ils posent ainsi une limite à la déjudiciarisation.
Des personnes privées en charge d’une mission de service public n’ont pas compétence pour modifier une décision de l’autorité judiciaire.
En outre, les CAF versant une allocation de soutien familial en cas d’impayés de pensions alimentaires, elles auraient pu, avec cette réforme, être intéressées à la détermination du montant des pensions.
En d’autres termes, se seraient retrouvées juge et partie.
Par conséquent, qu’il s’agisse d’une demande de révision intervenant après un divorce amiable, de concubins ou liés par un P.A.C.S. séparés avec enfants, toute demande de révision doit obligatoirement être effectuée via la saisine du Juge aux Affaires familiales compétent.
En revanche, à compter du mois de juin 2020, Les C.A.F. vont gérer le paiement des prestations alimentaires de façon automatisée, à la demande des parties.
Cette nouvelle attribution est liée au constat par l’État du nombre important d’impayés en matière de pensions alimentaires.
Comment garantir le versement de la pension alimentaire ?
- Les parents qui se séparent ou divorcent pourront demander au juge que la pension alimentaire soit versée par ce service de la Caf, à partir du 1er juin 2020, laquelle effectuera des prélèvements bancaires chaque mois sur le compte du débiteur, avant de les adresser au créancier de l’obligation alimentaire, dans une optique d’automatisation.
Et en cas d’impayé constaté de la pension alimentaire ?
Là aussi, les démarches seront considérablement simplifiées.
Il vous suffira de signaler l’incident de paiement, et l’intermédiation de la Caf sera immédiate.
Là encore, nous exprimons des réserves sur la déjudiciarisation sans garantie que cela entraînerait.
Le cas de figure typique est celui de l’ex concubin ou conjoint vivant à Paris et l’autre à Toulouse, pour lequel la distance peut s’avérer être un frein à l’introduction d’une action en justice.
Votre Caisse des allocations familiales prendra le relais du versement de la pension alimentaire : elle prélèvera directement le montant dû sur le compte bancaire du mauvais payeur.
Ayez à l’esprit que cette démarche ne sera pas automatique : vous devrez impérativement prévenir la Caf pour que le processus soit enclenché.
Et si votre ex-conjoint est dans l’incapacité de payer la pension alimentaire ?
Comme c’est déjà le cas aujourd’hui, la C.A.F. prendra le relais.
Elle vous versera l’allocation de soutien familial (ASF). Le montant de cette aide s’élève à 115,64 Euros par mois et par enfant, bien que celle-ci peut s’avérer être très inférieure au montant fixé par le Juge.
Une généralisation de ce nouveau système de recouvrement est envisagée à l’horizon du mois de janvier 2021.